Mathématiques et Cinématographe
CMAP (Centre de Mathématiques APpliquées) UMR CNRS 7641, École polytechnique, Institut Polytechnique de Paris, CNRS, France
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(Site WWW CMAP28 : cette page a été créée le 19/05/2006 et mise à jour le 03/10/2024 17:09:17 -CEST-)
(Texte rédigé à l'occasion du septième Salon de la Culture et des Jeux Mathématiques, Paris, 26/05/2006)
Depuis l'aube de l'humanité, l'homme a cherché à matérialiser et à conserver
une trace de ses perceptions visuelles : il a d'abord utilisé directement ses
mains comme outil et des pigments naturels comme le charbon de bois pour couvrir
les murs des grottes préhistoriques de scènes de chasse. Puis des outils plus
complexes, plus performants furent imaginés : pinceaux, compas, camera obscura,...
Vinrent ensuite les inventions de Niepce et Daguerre (la photographie), des
frères Lumière (le cinématographe) et de Georges Méliès (les effets spéciaux)
qui permirent de figer instantanément la
réalité ou bien d'en conserver la dynamique, sans toutefois se substituer aux
techniques plus ancestrales. Puis, dans les années 1940 John Von Neumann, Alan
Turing et bien d'autres encore inventèrent l'ordinateur. Même si cette machine
ne sait a priori faire que les quatre opérations arithmétiques élémentaires,
elle est programmable et possède de la mémoire. Tout calcul mathématique, a
condition qu'il ait été transcrit, dans ce simple langage, peut donc y être
effectué. Or les processus visuels primaires consistent en projections, sur la
rétine, de scènes évoluant dans l'espace tridimensionnel. Ainsi, il nous suffit
de les décrire mathématiquement, pour être capable, à l'aide des ordinateurs,
d'en calculer les images : c'est la Synthèse d'Image.
Nées principalement dans les années 1960 dans l'Utah, les techniques correspondantes
(à la fois matérielles et logicielles) ont connu un progrès phénoménal grâce d'une
part à ceux des technologies sous-jacentes (celle des circuits intégrés en particulier),
d'autre part à une compréhension toujours meilleurs des phénomènes optiques (par exemple
en ce qui concerne l'interaction entre la lumière et la matière) et des mécanismes de la
vision, et enfin à des avancées algorithmiques. C'est pourquoi, aujourd'hui, ces techniques
sont omniprésentes : conception assistée par ordinateur (CAO), visualisation scientifique,
publicité et évidemment cinématographe,... Elles ont atteint un tel niveau de qualité
que même l'œil le plus averti, ne peut plus faire la différence entre une image "naturelle"
et une image de synthèse (sauf évidemment volonté contraire du créateur ou encore lorsque
son contenu est tout simplement irréel...).
Quelles sont les différentes étapes menant d'une idée à l'image ? La première est celle de
la modélisation. Il s'agit de décrire (mathématiquement donc puisque c'est l'ordinateur qui
est l'outil fondamental...) les scènes à représenter. Cela constitue bien souvent plus de
50% du travail car, autant il est simple de décrire à un ordinateur un cube parfait, autant
cela sera complexe s'agissant de King Kong. Fort heureusement, il y a dans ce domaine un
cumul évident des expériences passées : c'est ainsi qu'il existe des bases de données de
modèles d'objets utiles (des automobiles par exemple) et que d'autre part la recherche
(industrielle principalement) est très active dans ce domaine. C'est ainsi qu'au cours
de ces dernières années des progrès décisifs ont été accomplis dans la description des
cheveux et des fourrures, ainsi que dans ceux de nombreux autres phénomènes naturels (l'eau,
la fumée, la croissances des plantes, les nuages,...) ou pas (mouvements de foule comme cela
fut utilisé dans la trilogie "Le seigneur des Anneaux" à l'aide d'agents intelligents simulés en interaction).
Mais la plupart des objets intervenant
ne sont pas statiques : ils se déplaceront les uns par rapport aux autres et évolueront.
Plusieurs techniques sont alors disponibles : langages descriptifs, "motion capture" qui
consiste à introduire dans l'ordinateur des mouvements réels effectués, par exemple, par
des acteurs de chair et d'os... Enfin, ces scènes virtuelles doivent être éclairées et
"baignées" éventuellement dans certaines ambiances (brouillard, pluie,...).
La seonde étape est évidemment le calcul des images selon certains paramètres liés à la position,
à l'orientation et aux caractéristiques (focale, diaphragme, défauts éventuels,...) de la caméra
virtuelle. Cela fait en général appel à des centaines d'ordinateurs en réseau sur lesquels sont
distribués les différents calculs (élimination des objets situés hors du champ ou bien cachés,
calcul et texturage des différentes surfaces, projection, élimination de défauts liés à la nature
"mosaïque" des images numériques,...). La troisième étape consiste en des post-traitements destinés,
si cela est nécessaire, à combiner entre-eux plusieurs flots d'images (par exemple les images
de synthèse qui viennent d'être calculées et des images "naturelles"). Enfin, la quatrième
et dernière étape consiste en un transfert sur un support approprié (magnétique ou chimique,
suivant les besoins).
Même si un certain niveau de perfection a été atteint, de nombreux progrès sont encore à
accomplir. Ainsi, ces techniques, liées à celles de l'intelligence artificielle, permettent
d'envisager des systèmes automatiques de narration et de mise en scène. Liées à celles des
jeux vidéos, elles ouvrent la porte au cinéma interactif où le spectateur, s'il le souhaite,
devient un élément important du processus créatif : acteur ou metteur en scène. Enfin, les
techniques dites de "réalité virtuelle" permettront une immersion toujours meilleure dans
les univers virtuels surgis de nos ordinateurs...
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