Quelques souvenirs personnels à l'occasion du cinquantenaire du CMAP (1974-2014)
CMAP (Centre de Mathématiques APpliquées) UMR CNRS 7641, École polytechnique, Institut Polytechnique de Paris, CNRS, France
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(Site WWW CMAP28 : cette page a été créée le 01/10/2024 et mise à jour le 28/10/2024 17:27:49 -CET-)
Ces quelques lignes sont écrites à l'occasion du cinquantenaire du CMAP : elles veulent d'une part rappeler les
progrès fulgurants de l'informatique [01] qui ont accompagné l'évolution du CMAP depuis sa naissance. Mais d'autre
part et surtout, elles sont destinées à souligner le rôle essentiel qu'ont joué tout au long de ma carrière
Jean-Claude Nédélec
et Pierre Vasseur.
Au début des années soixante-dix, l'ENST et l'Ecole Polytechnique décidèrent de créer le LACTAMME
(Laboratoire Commun des Techniques Audiovisuelles et des Moyens Modernes d'Enseignement) et de lui confier
deux missions : d'une part gérer les moyens audiovisuels de ces deux établissements d'enseignement supérieur et d'autre part faire des études avancées
dans le domaine de l'Enseignement Multimédia Assisté par Ordinateur.
En attendant que les travaux d'installation de l'X sur le plateau soient achevés, c'est
au Château de La Martinière , près du village de Saclay, au cœur d'un parc magnifique ,
que je débutai cette recherche que l'on m'avait confiée.
Pour mener à bien ce projet ambitieux un ordinateur T1600 [02]
fut acquis. Tout était à faire : du système d'exploitation aux
différentes applications utiles et d'ailleurs les premiers programmes furent assembés à la main et entrés bit par bit à
l'aide des clefs de son pupitre . Et c'est en soulignant les capacités de cette machine que l'on peut mesurer les progrès
dont nous fûmes les témoins au cours de ces cinquante années : 32 Ko de mémoire centrale, 1 MHz
et deux disques d'une capacité de 512 Ko chacun !
Et malgré ces caractéristiques qui semblent aujourd'hui invraisemblables, en seulement quelques années de nombreux développements originaux furent réalisés :
En 1977 mes activités furent transférées dans les nouveaux locaux de l'Ecole Polytechnique à Palaiseau.
Le T1600 fut remplacé en 1979 par un Solar 16.65 ordinateur du même constructeur,
compatible avec son prédécesseur,
tout en ne disposant malheureusement que de la même capacité de mémoire centrale,
mais de cinquante fois plus d'espace disque (50 Mo...) et d'une horloge un peu plus rapide (8 MHz...). Le portage du système d'exploitation et des applications fut donc simple et rapide.
La TN et la CAAO ne faisaient pas partie initialement du cahier des charges mais ces développements se sont rapidement amplifiés,
même si au début, faire des dessins et des images avec un ordinateur, fut qualifié par certains d'activités de saltimbanque.
Puis à la fin des années soixante-dix, l'ENST et l'Ecole Polytechnique décidèrent de reprendre en main la gestion de leurs moyens audiovisuels.
Du LACTAMME ne subsista alors que la partie recherche dont je m'occupais et pendant plusieurs mois il fut un laboratoire autonome du centre de recherche
de l'Ecole Polytechnique.
Les activités, en particulier dans le domaine de la synthèse d'images, se poursuivaient et pour les faciliter,
j'avais alors mis en place un réseau Ethernet nous raccordant avec le centre de calculs ; il fut le premier installé [03] et d'ailleurs la DSI de l'époque
n'en voyait pas l'intérêt !
Mais Pierre Vasseur, alors initiateur et directeur du centre de recherche,
fut certainement le premier à comprendre l'importance de la production d'images
par les ordinateurs. En effet, en 1984 s'intallait le C2VR [04]
dans les locaux de l'Ecole Polytechnique,
tandis que se développaient dès 1974 les activités, à la fois scientifiques et industrielles, du CMAP sous
l'impulsion de son directeur et fondateur, Jean-Claude Nédélec. Il fut donc alors décidé d'intégrer le LACTAMME au CMAP en 1981.
Mais une bonne partie des équipements du LACTAMME, de même que son personnel, ayant été financés par la DGT (Direction Générale des Télécommunications),
le LACTAMME y conserva un pied en étant aussi rattaché au CNET (Centre National d'Etudes des Télécommunications) à Issy-les-Moulineaux
et au CCETT (Centre Commun d'Etudes de Télévision et Télécommunications) à Rennes,
les directeurs successifs du CNET (en particulier Jean-Pierre Poitevin et Maurice Bernard)
ayant eux-aussi compris l'importance de plus en plus grande de l'image animée et sonore
dans les processus de communications.
Et c'est ainsi que les activités du LACTAMME basculèrent de l'EAO à la visualisation scientifique qui reste aujourd'hui ma spécialité.
Au cours de toutes ces années, de nombreuses relations ont été établies avec des laboratoires de l'Ecole Polytechnique
en particulier le LMD (Laboratoire de Météorologie Dynamique) et
le PMC (Laboratoire de la Matière Condensée),
mais aussi de l'extérieur comme ceux de l'EDF, de l'ONERA ou encore de l'IFP.
Je voudrai mentionner plus particulièrement les personnalités suivantes avec lesquelles j'ai eu la chance de collaborer :
Mais l'ouverture d'esprit et la tolérance de Jean-Claude Nédélec
et Pierre Vasseur m'ont permis de poursuivre simultanément
mes activité de CAAO. Et ce fut pour moi l'occasion de rencontres mémorables avec :
Jean-Christophe Averty,
Philippe Druillet,
Denis Fadier,
Pierre William Glenn,
Roberto Matta,
Vera Molnár,
Jacques Rouxel,
Iannis Xenakis,
Claude Zidi,...
sans oublier Johnny Halliday...
Dans ce domaine, j'ai pu participer et organiser de nombreuses expositions tant en France qu'à
l'étranger et aussi remporter de nombreux prix et en particulier le Grand prix du gouverneur d'Osaka en 1986
pour les premières visualisations tridimensionnelles de l'ensemble de Mandelbrot.
Le CMAP fête en cette année 2024 son cinquantenaire et en comptant mes années de retraite, j'y ai passé plus de 40 ans. Et ce furent des
années que l'on ne peut oublier tellement elles furent riches en découvertes, en développements, en rencontres et en amitiés.
Encore merci à Jean-Claude Nédélec et Pierre Vasseur
[05] et rendez-vous en 2074 !
- [01]
Tant sur les plans matériel que logiciel.
- [02]
Commercialisé par la société Télémécanique de Grenoble.
- [03]
Par la suite, en 1987, j'avais suggéré à la direction de l'Ecole Polytechnique de mettre en place un grand réseau fédérateur et hiérarchique
de type FDDI raccordant tous les laboratoires et tous les services de l'établissement.
- [04]
Le C2VR (Centre de Calcul Vectoriel pour la Recherche) était un Groupement d'Intérêt Économique de huit partenaires :
le CNRS,
l'Éducation Nationale,
la Météorologie Nationale,
l'École Polytechnique,
l'ONERA,
la CISI,
l'INRIA
et la DGA.
Pour l'héberger, fut construite une aile supplémentaire au "peigne" des laboratoires : la "fameuse" aile 0 qui abrite aujourd'hui le CMAP.
Plus de 30 techniciens et ingénieurs étaient présents sur le site pour gérer et maintenir en forme les impressionnants (selon les critères
des années 80's...) équipements informatiques. Le premier super-ordinateur installé en 1985 fut un CRAY 1/S 1000 (monoprocesseur, 80 MHz,
8 Mo de mémoire centrale et 8 Go répartis sur 8 disques). A ses côtés, une "dorsale" IBM 4341-II (monoprocesseur, 4 Mo de mémoire centrale et 2 Go sur disques)
gérait les fichiers utilisteurs et une "frontale" BULL DPS-8/70M (biprocesseur, 12 Mo de mémoire centrale et 5 Go sur disques) sous MULTICS assurait l'interface avec les
utilisateurs.
Puis en 1987 (?) le CRAY 1 fut remplace par un CRAY 2 (quadriprocesseur, 250 MHz et 2 Go de mémoire centrale) sous UNIX.
Tous ces équipements étaient raccordés entre-eux à l'aide d'un réseau HyperCanal (50 Mb/s). Ils nécessitaient de plus des salles climatisées,
des faux-planchers, des onduleurs et des batteries de secours.
Et précaution ultime, le super-ordinateur (CRAY 1 puis CRAY 2) était au sous-sol de l'aile 0, à l'intérieur d'une immense cage de Faraday
(secret défense oblige...).
Il convient de remarquer que les performances (en vitesse et capacité de stockage) de l'ensemble de ces équipements
étaient très inférieures à celles de n'importe quel ordinateur portable d'aujourd'hui que l'on peut emmener en promenade et
acquérir pour quelques centaines d'Euros (je crois me souvenir que le CRAY 2 seul avait couté 170 millions de Francs !).
- [05]
En plus de Jean-Claude Nédélec et Pierre Vasseur,
je tiens aussi à remercier très chaleureusement
Maurice Bernard,
Michel Petit,
Jean-Pierre Poitevin,
et Jean-Gabriel Rémy
qui eux-aussi m'ont toujours soutenu même dans mes activités extra-scientifiques.
Copyright © Jean-François COLONNA, 2024-2024.
Copyright © CMAP (Centre de Mathématiques APpliquées) UMR CNRS 7641 / École polytechnique, Institut Polytechnique de Paris, 2024-2024.